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Présentation

Professeur d'histoire-géographie depuis la rentrée 2004, j'enseigne depuis 2008 dans un collège du Pas-de-Calais, je suis chargé d'enseignement en histoire contemporaine à l'université de Lille et membre affilié de l'IRHiS.

Docteur en histoire contemporaine de l'Université de Bourgogne, je suis membre du bureau de la régionale Nord-Pas-de-Calais de l'Association des Professeurs d'Histoire et de Géographie et membre du Conseil d'administration d'Historiennes et historiens du contemporain (H2C). Je suis également membre de la Société française d'histoire politique.

Je suis aussi membre de la Commission exécutive de la CGT Educ'action du Pas-de-Calais, du Secrétariat de rédaction de la revue La Pensée ainsi que du comité de rédaction du Patriote Résistant.

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Publié par David Noël

J'ai achevé hier la lecture du premier tome de "L'année terrible" de Pierre Milza, consacré à la guerre franco-prussienne de 1870-1871. Le second tome consacré à la guerre franco-française et à la Commune de Paris est à paraître en septembre.

C'est au cours d'une virée jeudi après-midi à Dunkerque que j'ai trouvé le bouquin de Milza dans les rayons du Virgin Megastore. Depuis jeudi, je n'ai plus quitté ce bouquin que j'ai donc achevé hier soir vers 22h.

Agrégé d'histoire et professeur émérite à l'Institut d'Etudes Politiques de Paris, Pierre Milza est connu pour ses travaux sur l'Italie fasciste et est l'auteur de nombreuses biographies. Il a récemment signé des biographies de Mussolini (Fayard, 1999), de Verdi (Perrin, 2001), de Napoléon III (Perrin, 2004) et de Voltaire (Perrin, 2007).

C'est sous le patronage de Victor Hugo, de retour à Paris le 5 septembre 1870 et à qui il emprunte le titre de son recueil de poèmes publié en 1872, L'Année terrible, que Pierre Milza débute un récit construit comme un drame en trois actes qui va de la déclaration de guerre de la France à la Prusse le 19 juillet 1870 jusqu'à la signature du traité  préliminaire de paix franco-allemand à Versailles le 26 février 1871.

Le premier acte se déroule pendant l'été et ressemble à la chronique d'une défaite militaire annoncée. En juillet 1870, la France n'est pas prête à faire la guerre, une guerre que Bismarck a voulue pour parachever l'unité allemande autour de la Prusse. La politique maladroite de Napoléon III après Sadowa lui a aliéné les Etats d'Allemagne du Sud et l'Angleterre qui voient d'un très mauvais oeil les revendications françaises sur la Belgique et le Luxembourg. Poussé par les ultras et l'impératrice Eugénie, Napoléon III s'aliène le soutien de l'Italie en défendant les Etats pontificaux pendant que Bismarck consolide l'alliance de la Prusse avec la Russie et s'assure de la neutralité de l'Autriche. 

Au moment de la déclaration de guerre, la France ne pourra compter sur aucun appui extérieur. Pierre Milza explique les raisons du rapide effondrement de l'armée française : quand débutent les premiers engagements, début août, l'effectif des combattants côté français atteint tout juste 260 000 hommes quand la Prusse et ses alliés allemands sont capables de mobiliser près de 550 000 soldats. Si les Français disposent d'un bon fusil à répétition avec le Chassepot qui peut tirer jusqu'à douze coups à la minute, les Prussiens disposent d'une supériorité écrasante en artillerie et sont commandés par des généraux de valeur.

Dès le début du mois d'août, les Français sont battus à Wissembourg (le 4 août) et Froeschwiller-Woerth (le 6). L'armée du maréchal Mac Mahon se replie sur Châlons pour se reconstituer et défendre la capitale. Nommé à la tête de l'armée, le maréchal Bazaine remporte la bataille de Mars-la-Tour le 16 août, mais incapable d'exploiter la victoire, est défait à Saint-Privat le 18 août et s'enferme à Metz avec 180 000 hommes.

Le 23 août, l'impératrice Eugénie et les ultras du gouvernement ordonnent à Mac Mahon de se porter au secours de Bazaine. A la tête d'une armée de 120 000 hommes, Mac Mahon, accompagné de Napoléon III, tente de percer les lignes prussiennes, mais les Français sont battus le 30 août à la bataille de Beaumont et acculés par 242 000 allemands. Mac Mahon est contraint de se replier sur Sedan où les Allemands entament le siège de la citadelle. Les Français ne parviennent pas à briser l'encerclement allemand. Désorganisées, les troupes sont prises au piège et bombardées par les 700 canons allemands. Le 1er septembre à 16h30, Napoléon III ordonne la reddition de la ville. Après une entrevue avec Bismarck, Napoléon III est fait prisonnier et emmené en captivité en Allemagne.

A Paris, les républicains demandent le 3 septembre la déchéance de l'Empire. Le 4, le peuple envahit le Palais-Bourbon et Léon Gambetta à la tribune proclame la chute du régime impérial. Accompagné de Jules Favre et de Jules Ferry, il se rend à l'hôtel de ville et proclame la république : un gouvernement provisoire, sous la direction de Favre et du général Trochu, est constitué. C'est un Gouvernement de la Défense nationale, qui ordonne la résistance à outrance. C'est le deuxième acte de la guerre et Pierre Milza raconte les résistances et les espoirs déçus.

Pendant qu'à Paris, les effets du siège commencent à se faire sentir, Thiers entame une tournée des capitales européennes où il comprend vite que les grandes puissances n'interviendront pas pour éviter le dépeçage de la France.
Gambetta, qui a quitté Paris en ballon le 7 octobre pour rejoindre à Tours l'antenne gouvernementale du Gouvernement de la Défense Nationale organise une armée de secours chargée de libérer Paris, l'armée de la Loire. Forte de 70 000 hommes et 150 canons et commandée par le général d'Aurelle de Paladines, l'armée de la Loire parvient à reprendre Orléans après le victoire de Coulmiers, le 9 novembre, mais ne réussit pas à briser le dispositif d'encerclement prussien autour de la capitale où les tentatives de sortie du général Trochu se soldent par des échecs.
En outre, la capitulation de Bazaine à Metz le 27 octobre libère les troupes prussiennes du prince Frédéric Charles qui repousse l'armée de la Loire et reprend Orléans le 4 décembre.

A Paris, le général Trochu a compris que la guerre était perdue, mais le Gouvernement de la Défense Nationale, contesté par les blanquistes et une partie des sections de la garde nationale cherche à gagner du temps.

De son côté, tandis que l'antenne de Tours du Gouvernement de la Défense Nationale se replie sur Bordeaux, Gambetta réorganise les armées de secours.
L'armée de l'Est, commandée par le général Bourbaki, forte de 150 000 hommes mal équipés a pour mission de se porter au secours de Belfort, qui résiste aux Allemands. Au Nord, le général Faidherbe, qui dispose de 45 000 hommes est chargé de reprendre Amiens. A l'Ouest, le général Chanzy est nommé à la tête d'une deuxième armée de la Loire qui comprend l'ex-bataillon des zouaves pontificaux commandé par Charette et  devenu la "Légion des volontaires de l'Ouest". 
Dans l'Est, une armée hétéroclite de gardes nationaux originaires de Savoie ou des Alpes-Maritimes et de volontaires étrangers, notamment polonais et italiens, se bat sous les ordres de Garibaldi, qui est arrivé en France le 7 octobre.

Chemises rouges et ex-zouaves pontificaux combattant ensemble pour une République qui n'est pas la leur... Pour Pierre Milza, leur engagement préfigure ce que sera l'Union sacrée en 1914 et la Résistance pendant la seconde Guerre Mondiale : "Si diffère le drapeau derrière lequel ils marchent au combat - tricolore pour les uns, porteur pour les autres du Sacré-Coeur ou de l'effigie de la Vierge -, c'est bien pour défendre la même terre de France contre l'envahisseur prussien qu'ils se disent prêts à mourir."

Le dernier acte de la partie se joue en janvier-février 1871. La population parisienne est affamée, privée de tout. Coordonnées avec la sortie des troupes parisiennes, les offensives des dernières armées françaises échouent les unes après les autres. A l'Ouest, l'armée Chanzy est battue au Mans les 11 et 12 janvier 1871 et se débande. A l'Est, après avoir remporté la bataille de Villersexel le 8 janvier, l'armée Bourbaki échoue à libérer Belfort lors de la bataille de la Lizaine qui se déroule du 15 au 17 janvier 1871 et fuit vers la frontière suisse où c'est le général Clinchant qui négocie l'internement des 70 000 survivants en Suisse le 1er février. Au Nord, Faidherbe est battu le 19 janvier à Saint-Quentin et se replie sur Lille et Cambrai. Le même jour, la dernière tentative de sortie de la garnison parisienne est un échec et les 90 000 hommes engagés par Trochu essuient de lourdes pertes lors de la bataille de Buzenval et doivent se replier.
Les succès remportés par la petite troupe de Garibaldi ne peuvent plus changer le cours de la guerre.

L'empire allemand est proclamé le 18 janvier 1871 dans la galerie des glaces du palais de Versailles.

Le 26 janvier, Jules Favre, au nom du Gouvernement de la Défense National, signe la convention d'armistice avec Bismarck, complétée le 28 janvier. L'armistice général intervient le 15 février.

Entre temps, Gambetta a démissionné du gouvernement et s'est réfugié en Espagne. Des élections sont organisées le 8 février et voient le triomphe des monarchistes qui obtiennent 400 sièges contre 200 aux républicains et une trentaine aux bonapartistes. L'assemblée tient sa première séance le 13 février. Elu dans plusieurs départements, Garibaldi, qui a annoncé qu'il refuserait de siéger se rend à Bordeaux pour y faire un dernier discours, sous les huées des députés monarchistes, avant de regagner l'Italie. Thiers est désigné comme chef de l'exécutif. Immédiatement, il se rend à Versailles où après deux jours de négociations, la paix est signée le 26 février. L'Alsace et la Moselle sont annexées par l'Allemagne.

Au total, la guerre a fait 44 000 morts dans les rangs de l'armée allemande soit 14% des effectifs, (dont la moitié de maladie), 128 000 blessés et 100 000 malades. Elle a coûté à la France 139 000 morts (au combat ou de maladie), 143 000 blessés et 320 000 malades.

La signature du traité de paix marque la fin de la guerre franco-prussienne et le début d'une autre guerre, une guerre franco-française. Cette guerre franco-française sera au coeur du deuxième tome de "L'année terrible" de Pierre Milza, à paraître en septembre.
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